Divan le Terrible..

  • lepirelon

"Dormez, je le veux !..". Cette injonction d'hypnotiseur de music-hall vient d'être invoquée par une soixantaine de femmes qui accusent le psychanalyste Gérard Miller d'avoir abusé d'elles lors de séances d'hypnose dans son cabinet. Trois d'entre elles dénoncent des viols et de nombreuses autres des agressions sexuelles. Une vingtaine d'accusatrices évoquent des tentatives. Certaines étaient mineures au moment des faits. Une femme de 39 ans a déposé plainte auprès du parquet de Paris pour un viol commis alors qu'elle avait 17 ans. Selon son avocate, les faits ne sont pas prescrits. Le parquet de Paris a annoncé avoir ouvert une enquête préliminaire sur la base de six signalements. Une histoire à dormir debout ?..

 

Dans une enquête publiée par le magazine Elle fin janvier 2024, Gérard Miller est accusé par trois femmes d’agressions sexuelles et d’un viol, commis lors de séances d'hypnose dans les années 1990 et en 2004. Il nie avoir pratiqué l'hypnose dans ce cadre et affirme qu'"il n'y a jamais eu quoi que ce soit qu’on puisse qualifier d’agression sexuelle ou, pire, de viol". Il reconnaît cependant qu'il était "de fait un homme de pouvoir et il y avait, dès lors, une dissymétrie objective, dont on peut se dire aujourd’hui qu’elle était purement et simplement rédhibitoire". Une sorte de "soumission" ?..

 

Début février suivant, Mediapart publie les témoignages de dix femmes, âgées de 16 à 21 ans au moments des faits, qui l'accusent également d'agression sexuelle ou de comportements déplacés. Gérard Miller affirme ne pas "mettre en doute un instant l'émotion, la colère et la souffrance" de ces femmes et n'avoir pas mesuré à l'époque la "dissymétrie" qui existait entre lui, un "homme de pouvoir", et ces femmes "plus jeunes". Toutefois, il assure n'avoir "jamais contraint personne" et s'être toujours assuré de recueillir leur consentement. Air bien connu : Qui ne dit mot consent ?..

 

Au cours de ce même mois, le magazine Elle publie le récit de 41 femmes, pour certaines mineures au moment des faits, témoignant de comportements problématiques de Gérard Miller entre 1993 et 2020. Le magazine de France 2 "Envoyé spécial" a diffusé de nouveaux témoignages de victimes, le 29 février. Avec un point commun entre toutes ces femmes qui parlent : elles étaient très jeunes, elles décrivent l'hôtel particulier du psychanalyste dans l'Est de Paris et, pour une partie d'entre elles, elles ont subi un black-out, un trou noir, comme si elles avaient été droguées à leur insu . .

 

Le recensement de ces témoignages concordants laisse peu de doutes quant aux faits reprochés .  Il semble que Gérard Miller profitant de son exposition médiatique dans des émissions de variétés abordait des jeunes femmes du public (où "il faisait son marché", selon divers témoins) pour les inviter chez lui, où il leur proposait des séances d'hypnose, puis tentait d'abuser d'elles. Si c'était le cas, il s'agirait là d'un dévoiement délictueux de la pratique et de la déontologie de sa profession . 

 

Par ailleurs, outre l'aspect pénal, on ne peut qu'être choqué par de tels agissements venant d'un homme qui, depuis des années, dans nombre de débats, n'a cessé de vouloir donner des leçons de moralité aux quatre vents. Arguant de son engagement "à gauche" ( jadis maoïste puis soutien des Z'insoumis ) pour se poser en parangon de vertu. S'exprimant très souvent de façon péremptoire et inquisitrice devant ses interlocuteurs. Face à ces rodomontades, quelques esprits perspicaces discernaient sous ses rictus le masque de la perversité et l'avaient surnommé "Divan le Terrible". .

Comme disait Lacan: "On finit toujours par devenir un personnage de sa propre histoire . .".  MB

 

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Entretien Elisabeth Roudinesco : «Tout le monde voyait que Gérard Miller utilisait l’hypnose pour son propre plaisir»

 

L’historienne de la psychanalyse freudienne juge que son collègue lacanien, accusé de violences sexuelles par une cinquantaine de femmes, jette l’opprobre sur l’hypnothérapie en faisant de sa pratique un moyen de manipuler les êtres.

 

Avant cette affaire, Gérard Miller était-il un psychanalyste respecté ?

Il a été désavoué par les sociétés psychanalytiques dans leur ensemble, qui rejettent ceux qui utilisent cette discipline pour interpréter publiquement le comportement des hommes politiques. Gérard Miller doit sa célébrité uniquement à des producteurs d’émissions de télévision qui, pendant trente ans, l’ont invité à proférer des diagnostics foudroyants en acceptant qu’il se présente comme l’incarnation même de la psychanalyse. 

Le comportement de Gérard Miller avec les femmes était-il connu de son entourage ?

Tout le monde voyait qu’il utilisait l’hypnose pour son propre plaisir, comme une «expérience» – c’est le mot qu’il emploie – et non pas comme une thérapie. D’un côté, il se présente comme le représentant vertueux d’un lacanisme lumineux et, de l’autre, il se livre à des activités d’hypnotiseur nocturne. Dans son cabinet, aménagé dans un hôtel particulier, il reçoit des patients ordinaires et au sous-sol, dans un «home» sans fenêtres, il se livre à des expériences hypnotiques, alcoolisées, avec des femmes recrutées sur les plateaux de télévision.

Il a tout de même été invité pendant trente ans dans différentes émissions de télévision…

Il y a, à cet égard, une responsabilité des producteurs qui disent n’avoir rien vu d’autre qu’une activité de «dragueur». Et il y a ceux qui prétendent avoir été «bernés», terme sur lequel on pourrait s’interroger. A l’écran, Miller dégageait des caractéristiques qui auraient dû inquiéter. Il maniait l’injure et accusait les autres de ce qu’aujourd’hui on lui reproche. Tel un Fouquier-Tinville coléreux, il tirait à vue au nom de la Révolution et de la psychanalyse, comme d’autres au nom de la religion. Il lâchait ses fléchettes comme dans un stand de tir : il faisait rire ou il effrayait à cause de la haine qui se dégageait de son discours.

Dans l’un de ses livres, Antipathies (Grasset 2014), il donne la liste, en les nommant, de tous les gens qu’il déteste. Il met dans le même sac Alain Badiou et Alain Soral. Et va jusqu’à comparer Charles de Gaulle à Pétain et à Jean-Marie Le Pen. De tels excès de langage veulent toujours dire quelque chose sur la pulsion sexuelle. J’ajoute que quand on est psychanalyste, on doit se réclamer de l’une des grandes constances du discours freudien énoncée dans Malaise dans la civilisation, en 1930 : l’humanité doit dominer ses pulsions, sinon elle est vouée au crime.

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                                                                             Vice versa ?..

 

 

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